Histoire
Le territoire de Gespunsart faisait autrefois partie du comté de Castrice. La dénomination existe déjà en l’an 800, elle apparaît dans acte de Foulques le vénérable, archevêque de Reims, qui cite l’existence d’une chapelle à cet endroit. Dans cette charte, le village est cité sous le nom de Gébuinsart (Gebuinisartum), c’est-à-dire le sart de Gébuin, nom fort commun à cette époque, probablement le nom de propriétaires qui possédaient une exploitation dans ces lieux ; la finale sart désignant une partie de forêt défrichée et cultivée.
Le nom de la commune se transforme successivement en Gepuinsart, Jupinsart, Gepunsart, Jepinsart, Spinsart, Guesponsart. Ce n’est qu’au 18e siècle que prévaut la forme actuelle Gespunsart.
Au 9e siècle, la chapelle déjà placée sous le patronage de Saint Remi, appartient à la collégiale de Braux, mais le village et son territoire appartiennent aux seigneurs d’Orchimont.
En 843, lors du traité de Verdun qui partage le royaume de Charlemagne entre ses trois petits-fils, Gebuinsart reste sous le domaine de Lothaire.
En 870, par le traité de Mersen, le village revient à la France et passe sous l’autorité des comtes de Rethel.
En 1081, le territoire passe sous l’égide du chapitre de Braux qui en devient seigneur.
La paroisse de Gespunsart prend de l’ampleur et, en 1300, a pour annexe ou secours l’église d’Eslemont (Aiglemont) et fait partie du doyenné de Mézières.
Le chapitre de Braux possède tous les pouvoirs d’un seigneur féodal et nomme « le mayeur », agent seigneurial nommé à côté des échevins par le seigneur, pour l'assister dans l'exercice de la justice. Il perçoit même un impôt spécial « l’avoine des chiens », impôt annuel destiné à payer la nourriture des chiens de chasse des comtes de Rethel.
En 1570, la châtellenie de Château-Regnault passe sous les mains des princes de Guise, et le chapitre de Braux se voit dans l’obligation de céder au duc Henry de Guise une partie de la vallée de la Semoy et Gespunsart.
Vers 1600, le village est pillé et incendié par des brigands ayant pour chef de file un dénommé Péringue.
En 1605, la principauté de Château-Regnault passe à la maison des Conti.
En 1629, Marguerite de Conti cède par contrat du 10 mars 1629 Château-Regnault, et donc Gespunsart, à Louis XIII, rattachant le village au royaume de France. Cependant, Gespunsart se trouve être une enclave entourée par les villages dépendants de l’Autriche et du Luxembourg que sont Neufmanil, La Grandville, Gernelle et Rumel. Le seul moyen de communication avec la France ne peut se faire qu’avec Château-Regnault à travers bois, ne faisant qu’aggraver les conflits avec les villages voisins.
De 1705 à 1710, lors de la guerre de succession d’Espagne, le village de Gespunsart, enclavé de tous côtés, par des villages soumis au Duché de Luxembourg vit de grandes souffrances. Des forts et des redoutes sont érigés autour du village. L’ennemi condamne le village à une contribution de guerre, mais la France s’y oppose sans toutefois donner les moyens de se défendre.
Mécontents de ce refus, le 6 août 1705 à 8 heures alors que la plupart des habitants étaient au champ, les Prussiens pillent et brûlent le village en assassinant cinq civils.
En 1767, suite à la vente des domaines du roi Louis XV le 4 novembre, Nicolas Desprez de Barchon, seigneur de Neufmanil, se fait adjuger la seigneurie et les droits honorifiques au roi dans les villages d’Aiglemont et de Gespunsart, avec pouvoir d’y nommer maires, échevins, greffiers et sergents. Les habitants refusent et se font des plus menaçants, si bien qu’il fait marche arrière sans abandonner son projet. L’affaire est portée devant la cour du roi. L’affaire traîne en longueur sans qu’aucune décision ne soit prise, un doute existant sur le compte-rendu des commissaires, abusés semblerait-il par l’influence du seigneur de Neufmanil. En 1788, suite au décès de ce dernier, son gendre le seigneur d’Angeste reprend ce procès, suscitant toujours la plus ferme opposition des habitants. Le procès n’aboutit pas, la Révolution mettant fin à cette guerre par l’abolition des droits seigneuriaux.
En 1788, commencent les travaux de la nouvelle église, l’ancienne étant devenue trop petite et commençant à s’écrouler. La dédicace de la nouvelle église eut lieu le 13 janvier 1790, jour de la fête de son patron, Saint Remi.
Sous le Directoire, la France nécessitant un remaniement administratif, Gespunsart devient chef-lieu de canton. Ce canton se compose des communes de Gespunsart, Sugny, Bagimont, Pussemange, Cons-la-Grandville, Aiglemont, Neufmanil, Nouzon et Joigny. Le village conservera ce titre jusqu’à l’arrivée du Consulat où il cédera sa place à Charleville.
La fin de la période Napoléonienne, avec l’entrée des alliés en 1814 et le siège de Mézières en 1815, est une nouvelle période difficile pour Gespunsart. L’armée prussienne est cantonnée au village où elle fait régner l’ordre rendant toute résistance impossible et appliquent des impositions, réquisitions, travail forcé. Le village reste occupé jusqu’en 1818 par la dixième colonne de munition d’artillerie prussienne, laissant un village complètement ruiné.
Avec la Restauration et le Gouvernement de Juillet, arrive une période plus calme pour la commune permettant aux habitants d’apporter des améliorations à la condition de vie du village. Les chemins et routes étaient devenus impraticables, les ruisseaux coulaient dans la rue, les eaux stagnantes formaient autour du village de profondes ornières où les charretiers restaient embourbés. C’est en 1828 que l’administration locale construit des aqueducs et des routes larges et entretenues. La population qui croît rapidement nécessite de nouvelles constructions, la commune cède de vastes terrains à bâtir. C’est ainsi qu’entre 1826 et 1827 s'élève le quartier des Pâquis, qui double presque le village, les travaux permettant également de faire baisser le niveau des eaux dans cette partie humide. Le cimetière qui entourait l’église est transféré aux abords du village en 1833. En 1846, la place des Pâquis est ornée d’un lavoir qui servira également d’abreuvoir. Plusieurs lavoirs sont également construits.
En 1832, le service des postes devient quotidien, les foires et marchés sont rétablis.
En 1845, à la fin du règne de Louis-Philippe, une nouvelle crise commerciale s’abat sur le pays. L’industrie du clou, presque unique ressource des habitants, périclite pendant cinq ans. Le prix des vivres, le manque de travail et le pourrissement des pommes de terre rendent la vie presque insupportable, puis le travail revient.
La commune continue ses améliorations. En 1848, les Molières et les Hyanchenois sont défrichés, et de profonds fossés sont ouverts qui servent de déversoirs aux eaux stagnantes, le lit de la Vrigne redressé permet un assèchement du sol faisant diminuer l’épais brouillard et le nombre de fiévreux. Commence également la réfection des routes vers les communes voisines, la mise en place de réverbères (1859), la construction d’un second jet d’eau place de l’Église (1860), la multiplication des bornes-fontaines, la restauration du clocher (1864), la construction d’un abattoir public (1867).
Arrive la guerre de 1870, qui amène également son lot de misère au village. Dès le 1er septembre, les chemins menant vers la Belgique sont remplis de gens chargés de bagages et poussant leurs bestiaux. Les cavaliers français fantassins et artilleurs en débandade arrivent par les hauteurs de Sugny. Dix-mille soldats passent ainsi vers Mézières. À la suite des militaires arrivent les blessés, le village se transforme en vaste hôpital. Les écoles et les salles de la maison commune sont converties en hôpitaux, certains bourgeois recueillent les blessés chez eux.
Le 3 septembre, commencent les réquisitions des ennemis campés à Bosseval, les uhlans envahissent les maisons, enfoncent les portes et font main-basse sur la nourriture.
Le 24 octobre, deux commissaires de la préfecture se présentent pour organiser un corps de francs-tireurs qui réunit 30 volontaires et qui est chargé de faire le guet dans les environs. Dès le début, ces derniers embusqués dans les taillis attaquent un groupe d’uhlans et en enlèvent deux, les ramènent à Gespunsart, puis finissent par les amener à Mézières. Les Prussiens irrités détachent une troupe de 20 cavaliers et de 70 fantassins qui cernent le village, poursuivent à coups de fusils quiconque essaye de fuir, arrêtent plusieurs conseillers municipaux et veulent réquisitionner toutes les armes qui ont déjà disparu. En 1871, à la suite d’une nouvelle attaque des francs-tireurs, les Prussiens attaquent de nouveau le village, enfoncent les portes et les fenêtres, frappent les femmes, entassent les hommes dans l’église et tirent sur ceux qui essaient de fuir. Ils finissent par les libérer et condamnent la commune à leur verser 81 000 francs de contribution.
Heureusement la paix arrivera le 1er mars.
En 1896, s’ouvre une ligne ferroviaire entre Nouzon et Gespunsart.
Dès le 25 août 1914 à 5 heures du matin, les uhlans et lanciers allemands à cheval sont déjà à Gespunsart. Le petit train est rempli de civils prêts à partir vers Nouzon fuyant vers la rive gauche de la Meuse. Durant quatre ans, les habitants subiront l’occupation ennemie et la difficile séparation de familles : les jeunes sur le front, les prisonniers, les personnes réquisitionnées pour les travaux sur place, les jeunes filles expédiées à Bergnicourt dans la Marne pour travailler dans les champs exploités par l’occupant.
Cette guerre aura coûté la vie à 61 enfants du pays, 55 militaires et 6 civils. L’église perd ses deux cloches enlevées par les allemands en 1917. Dans les années 1920, les communes iséroises de la Mure, Mayres-Savel et La Motte-Saint-Martin recueillent des fonds pour la commune sinistrée par l'occupation allemande, pendant la Première Guerre Mondiale. L’argent collecté sert notamment à restaurer l’église (cloches, orgues). Les cloches disparues seront remplacées par deux nouvelles baptisées le 6 avril 1924.
Devant l’invasion rapide de la Belgique le 10 mai 1940, les troupes françaises repassent en débandade vers Mézières. La population civile reçoit l’ordre d’évacuer le 12 mai vers Vaux-Villaine par ses propres moyens. Ensuite, des organismes doivent prendre en charge les évacués, ce qui se fera dans la pagaille, sous les tirs et les bombardements, par tous les moyens de locomotion possibles vers Parthenay (Deux-Sèvres) village de repli. Les réfugiés s'éparpillent ensuite dans les villages environnants et jusqu’en Vendée.
Les habitants reviendront petit à petit en fraude, le village étant occupé par les Allemands en zone interdite. Des rafles de réfractaire au service du travail obligatoire (STO) ont lieu, surtout en 1944.
Début septembre 1944, alors que les Allemands battent en retraite, ils traversent le village vers la Belgique Les francs-tireurs abattent des platanes juste avant Rogissart barrant ainsi provisoirement la route aux soldats. Furieux, les Allemands reviennent au village tirant sur tout ce qui bouge, tuant ainsi Hilaire Carlin, veuf et père de huit enfants. Une plaque commémorative à son hommage est érigée place des Pâquis.
La guerre 39-45 coûtera la vie à six militaires et cinq civils dans le village.
En 1966, le troisième clocheton de l’église dut être démonté, menaçant de s’écrouler.
L’église est classée en 1984.
En 2000, la Sauvegarde de l’Art français accorde une subvention de 18 294 € pour la restauration du clocher.